mercredi 20 juin 2012

De l'autre côté de la Méditerranée (3)

Un mois que nous avons quitté le Liban, un mois qu'il ne nous quitte pas... 
J'aurais voulu vous parler de l'air salé au bord de l'eau, de ce vent tiède qui ébouriffe et laisse les cheveux salés à la fin de la journée, des odeurs de pots d'échappement de ces véhicules rescapés des années 70, de ka poussière qui donne à Beyrouth une couleur de sable sale, sans pour autant lui enlever son charme ; 
Il y a aussi les senteurs du souk de Saïda, entre épices, herbes, pains chauds, et des eaux lancées depuis les échoppes où l'on égorge les poulets devant les clients qui attendent sagement. Il y a la chaleur lourde qui vous prend au détour d'une ruelle du souk lorsque vous débouchez sur une petite place ou au coeur du magnifique Caravansérail, restauré et magnifique, presque insoupçonnable depuis les rues crasses alentours.
A peine quelques kilomètres de voiture, on ne sort pas encore de Beyrouth, et déjà la route grimpe vers les montagnes, là où certaines familles libanaises estivent pour échapper à la chaleur de l'été en ville. L'air est plus frais, plus vif, presque froid dans le Chouf, au milieu des Cèdres millénaires. Les odeurs ont changé, végétales et fraîches, marquées par les cèdres. On les retrouvera peut-être dans le miel, récolté dans les ruches installées un peu plus bas.
A Byblos, station balnéaire, port et site archéologique, c'est un air plus léger, toujours salé, un air de marée, et de pêche du jour. C'est aussi - dommage - l'odeur dégagé par un hors bord de luxe qui tente une entrée dans le Vieux Port et attend qu'on vienne en barque le délester de ses passagères venues déjeuner sur une des terrasses du port...C'est aussi le flottement du parfum d'une mariée sortie tout droit d'un livre de princesses, qui prend la pose sur les rochers.
Dans la plaine de la Bekaa, vers Baalbek, c'est un air poussiéreux, sableux qui accompagne le chant du muezzin appelant à la prière ; un enregistrement, un haut-parleur qui diffuse sa voix lancinante, un soleil chaud qui aplatit les ombres, le Temple de Bacchus immense et debout depuis quelques milliers d'années, la frontière syrienne, toute proche et soudain, l'évidence : nous sommes ailleurs.